Parlez-en en bien, parlez-en en mal, mais parlez-en. On peut dire que les pistes cyclables font jaser. Que vous soyez cycliste aguerri·e, cycliste du dimanche, marcheur·euse infatigable ou automobiliste fidèle, il peut être difficile de démêler le vrai du faux avec tout le bruit entourant ces couloirs de mobilité active. Alors attachez votre casque avec de la broche, voici 6 mythes tenaces sur ces fameuses pistes cyclables.
1. “Les pistes cyclables prennent trop de place”
On entend souvent dire qu’il y a trop de pistes cyclables à Montréal. Pourtant lorsque l’on regarde les chiffres, ceux-ci nous racontent une autre histoire. Malgré l’ajout de plusieurs kilomètres de voies cyclables, à Montréal, les pistes cyclables représentent environ 1 % de l’espace de la voie publique, alors que l’automobile en occupe près de 75 % [1].

On aura beau retourner les chiffres dans tous les sens, il est difficile de dire que le réseau cyclable prend toute la place. En ajoutant des pistes cyclables, on rééquilibre plutôt un réseau historiquement dominé par la voiture.
2. “Les pistes cyclables créent plus de congestion”
Il est vrai que la congestion à Montréal est un enjeu. Mais en accuser les pistes cyclables, c'est d'omettre beaucoup de facteurs. Il ne faut pas oublier qu’une personne de plus qui se déplace à vélo, ça fait une personne de moins sur la route. Sachant qu’une piste cyclable peut accueillir jusqu’à 7500 déplacements à l’heure, contre environ 600 à 1600 pour une voie automobile [2], le calcul est simple: le vélo permet de transporter plus de gens dans un espace plus petit.

Aussi, il ne faut pas oublier que le nombre de véhicules à Montréal a augmenté de 25 % en 20 ans [3]. C’est un enjeu énorme considérant qu’il n’y a tout simplement plus de place pour créer de nouvelles rues. Par conséquent, on doit faire déplacer les gens sur le réseau déjà existant. Si l’on souhaite désengorger nos rues, il faut offrir des alternatives viables à l’auto solo. Et c’est précisément ce que permettent les aménagements cyclables.
3. “Les pistes cyclables tuent les commerces”
Plusieurs s’inquiètent des effets des aménagements cyclables sur les artères commerciales. Pourtant, les données montrent que les commerces bénéficient souvent de ces transformations.
Prenons la rue Saint-Denis : à l’arrivée du REV, certain·es prédisaient un effondrement commercial. En réalité, le taux de locaux vacants est passé de 25 % en 2019 à 15 % en 2023, et le nombre de commerces atteint aujourd’hui un record [4].

Des résultats similaires ont été observés ailleurs, notamment à New York, où une étude sur la 9e Avenue a montré une hausse de 49 % des ventes après l’ajout d’une piste cyclable, contre 3 % ailleurs dans la ville [5].
Bref, le vélo, c’est aussi bon pour l’économie locale.
4. “Les pistes cyclables ne servent à rien”
C’est tout le contraire. Les pistes cyclables :
- Sécurisent les déplacements pour tous les usagers;
- Réduisent la pollution;
- Allègent la congestion;
- Favorisent la santé publique;
- Offrent une alternative moins coûteuse pour les individus.
Les chiffres parlent d’eux-mêmes. En 2023, le réseau BIXI à lui seul a accueilli 576 000 usager·ères et permis plus de 11 millions de déplacements [6]. Le REV Saint-Denis, mis en place il y a seulement 5 ans, a déjà dépassé les 1,6 million de passages en 2024 [7]. Ça en fait du monde de moins en voiture!
À chaque fois qu’une personne choisit le vélo, c’est une voiture de moins dans les rues et une ville plus fluide et sécuritaire pour tous les usagers (même les automobilistes!).
5. “Les pistes cyclables coûtent cher”
Oui, aménager des pistes cyclables demande des investissements. Mais ils restent modestes par rapport aux budgets globaux liés aux transports.
Regardons les chiffres de plus près. Le budget décennal de la Ville de Montréal prévoit 7,5 milliards de dollars pour les infrastructures routières, dont 7 % (541 millions) sont dédiés au réseau cyclable [8]. Cela reste une part relativement faible, surtout quand on sait que plus de la moitié des Montréalais·es utilisent le vélo à un moment ou un autre.
Et si l’on considère les coûts sociaux (infrastructures, santé, pollution, congestion), la différence est frappante :
- Une personne se déplaçant en voiture coûte en moyenne 15 250 $ par année [9]
- Une personne à vélo, 2400 $ [10]

Cela représente une économie de 12 850 $ par personne chaque année. À l’échelle de la métropole, le coût global lié à l’usage de l’auto est estimé à 9,4 milliards de dollars, contre 113 millions pour le vélo [11]. En voulez-vous des économies, en voilà!
6. “Les pistes cyclables sont déneigées avant les trottoirs”
C’est une perception qui revient souvent en hiver : les pistes cyclables auraient droit à un traitement de faveur lorsqu’il neige. En réalité, ce n’est pas tout à fait le cas.
Rappelons d’abord que le réseau cyclable ne représente qu’environ 1 % de la voie publique, soit 729 km de pistes, contre près de 6000 km de trottoirs [12]. Si les opérations de déneigement commencent au même moment, il est logique que les pistes soient dégagées plus rapidement : il y en a tout simplement beaucoup moins.

Ensuite, il faut savoir que le déneigement des pistes cyclables et celui des trottoirs ne mobilisent pas les mêmes équipes ni le même équipement [13]. Les opérations se déroulent donc en parallèle, sans que l’une n’empiète sur l’autre.
Enfin, un petit détail technique qui a son importance : les pistes cyclables sont généralement construites en asphalte, un matériau qui retient mieux la chaleur que le béton utilisé pour les trottoirs. Résultat : la neige y fond plus vite, même sans intervention.
En conclusion
Faire plus de place au vélo, ce n’est pas être anti-auto. C’est reconnaître que notre ville a besoin de solutions plus variées et efficaces pour les déplacements du quotidien.
Les pistes cyclables sont un outil efficace, rentable et sécuritaire pour répondre à des défis bien concrets : congestion, santé publique, inclusion sociale et crise climatique. Alors, la prochaine fois que vous croiserez un·e cycliste, donnez-lui donc un peu d’amour.